Samedi 5 janvier 6 05 /01 /Jan 13:15

Parler de ses traumatismes, c'est pour moi comme un accouchement. Long, difficile, laborieux.
J'y pense, y repense, me demande comment formuler, si je fais bien de le dire, de l'écrire.
Je construis le texte dans ma tête, le démolis pour mieux le refaire.
Et j'attends, sagement le moment où je me sens capable de dire ces choses qui me rongent.

Ether y el sexo part 1 a été difficile à expulser, se présentant peut être par le siège, j'ai dû utiliser des forceps pour pouvoir sortir ce poids.

Aujourd'hui je suis prolixe, j'ai besoin de dire les choses.

Ether y el sexo part 2; c'est l'histoire d'une petite fille à peine remise de son premier traumatisme qu'elle doit en revivre un autre...

Un an plus tard à peut près.

Les cauchemars s'estompaient à peine. je rêvais moins de cette cave, que je m'enfuyais en m'accrochant sous une voiture, je me réveillais moins en sursaut, hurlant d'une voix muette, éteinte par la terreur.
Je tapais moins au mur en pleine nuit, appelant ma mère au secours par le seul moyen à ma disposition, mes membres cloués au lit, ma voix partie.

La vie reprenait ses droits dans le silence imposé par les autorités, ma vie s'écoulait à nouveau comme avant, à peine différente.

C'est alors qu'  "il"  est revenu. "il" allait et venait dans notre vie de famille, venant quelques jours voir son père qui se trouvait être par un mauvais coup du destin aussi le mien.

"il"; mon demi frère. Une bonne dizaine d'années de plus que moi. Ce grand bonhomme qui nous faisait fumer des clopes dans l'allée de l'immeuble sans j'espère se rendre compte que nous étions des petits enfants...

"il" revenait.

Depuis sa dernière venue, mes parents avaient déménagé leur chambre pour m'y installer et me laisser la jouissance d'une chambre seule alors que je partageais auparavant mon univers avec mes deux frères.

Les choses avaient donc changées..."il" dormirait dans ma chambre...Et "il" avait changé aussi.
Plus grand, plus fort, plus bête.

Mon lit est devenu son lit, je dormais par terre, sur un matelas installé pour l'occasion.
"il" parlait toujours beaucoup. De lui, de lui et un peu de lui. De combien il était beau et fort, de tout ce qu'il savait de la vie.
La lumière de chevet allumé, il parlait et je voulais dormir, petite fille imperméable à ses narrations sans fins d'histoires sans interêt à mon âge d'alors.

Et il n'a pas fait que parler.

"il" voulait que je le touche, que je touche cet endroit de lui qu'on ne voit normalement jamais. Sa nudité sur mon lit, cette chose dressée sous mes yeux, sa main qui prend la mienne.
Il accompagnait le geste qu'il imprimait à ma main prisonnière de sa main à lui. 
Je ne voulais ni voir ni toucher cette chose dure, je voulais retirer ma main. Je ne voulais plus sentir ça sous mes doigts, je ne voulais pas avoir ce regard affamé et vicieux vissé sur moi, je ne voulais plus voir ce sourire immonde sur ses lèvres. C'est mon demi frère! Qu'est ce qu'il fait?
Pourquoi il fait ça?

J'avoue ne pas me souvenir de ce qu'il s'est passé ensuite cette nuit là. Peut être ne vaut il mieux pas, je l'ignore; mais je n'ai aucun souvenir de plus que ces caresses forcées...

Mais tout à changé ce soir là. Il m'a dit le lendemain de ne rien dire à personne, que cela tuerait notre grand mère et que je ne voulais pas être responsable de la mort de grand mère; n'est ce pas?
Pour mieux imprimer son empreinte, il profitait de chaque moment seul avec moi pour me donner un coup.
De poing, de pied, avec une baguette qui était chez nous.

Dehors, il s'amusait et me faisait "malencontreusement" mal. Me poussait contre le bec d'évacuation d'eau du balcon du rez de chaussée avec une force telle que le bec s'est brisé contre mon dos.
Il me traitait de douillette, de poule mouillée.

Je n'ai jamais rien dit de cette nuit là, de ces coups donnés dans le dos du reste de la famille. J'ai obéi à ses ordres; trop appeurée d'être la responsable de la mort de notre grand mère pour oser parler.

Et puis, j'ai oublié. Mon esprit a totalement rayé ces évenements de mon esprit pendant longtemps.

Je le haÏssais, mais j'ignorais pourquoi. Il me terrorisait, mais je ne comprenais pas pourquoi.

Et puis, il s'est fait rare chez nous. Comme un aveu masqué de ses actes, il a disparu.

Un jour, durant la période où je tentais d'exorciser mon agression, pendant ces moments tellement douloureux, ces images me sont revenues à la mémoire.
Comme si ce que je traversait n'était pas assez difficile, je devais affronter encore ces images là, ces souvenirs là, pourtant depuis longtemps enfouis dans un tiroir bien fermé de mon esprit.
Pourquoi se souvenir de ça??

Je n'en n'ai parlé à mes parents qu'à l'âge de 31 ans. Impossible avant d'évoquer ces souvenirs en regardant mon père dans les yeux. Terrorisée par l'empreinte de cet adolescent d'alors qui m'avait fait jurer de ne rien dire.

Ce jour là, j'ai eu un immense poids en moins sur la poitrine, mes parents m'ont regardé comme une victime, m'ont reconnue comme une victime. 
Je n'y étais pour rien. Je n'étais responsable ni de cette agression dans la cave, ni des actes de mon demi frère.
Pour la première fois en 25 ans, je me suis sentie victime; dédouanée de toute responsabilité, acquittée, non coupable. Un non lieu du procès que je me faisais depuis si longtemps. Un soulagement immense!
Pour la première fois, j'ai exigé quelque chose. J'ai imposé le respect de moi en demandant aux gens que nous avions en commun de choisir. 
Accepter de le cotoyer était accepter ce qu'il m'avait fait. Lui ou moi; mais pas les deux.
Pas de prescription possible. je ne pardonne pas, j'en suis incapable.

Je me suis sentie plus sereine, apaisée de cette parole enfin débloquée.

Jusqu'à ce que je doive le croiser par hasard, chez sa soeur.
Terrifiée, tétanisée, j'ai su me composer un personnage hautain et froid. Très loin de ce que je suis pour ne laisser aucune porte ouverte. Son attitude m'a aidé. Mal à l'aise, très gèné, il ne savait comment se comporter.

Mais pourquoi n'ai je pas su alors lui dire? Lui dire ce que je pensais de lui au fond de moi. Que je le haïssais, que je le vomissais, qu'il était un monstre immonde à mes yeux, qu'il m'avait achevée, qu'il avait fini de me tuer.
Impossible d'évoquer le sujet; impossible d'être moi face à lui.

La petite fille de 7 ans dont il avait abusé, qu'il avait frappé ne pouvait pas. Celle que j'étais ne pouvais pas empècher cette petite fille qui est toujours en moi de revenir; effrayée par ce monstre de la nuit.

Je ne l'ai jamais revu depuis, je ne le reverrai pas, je ne l'affronterai pas; la force, le courage me manquent.

 

Par ether-et... - Publié dans : Viols et conséquences
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Commentaires

"Mais pourquoi n'ai je pas su alors lui dire? Lui dire ce que je pensais de lui au fond de moi. Que je le haïssais, que je le vomissais, qu'il était un monstre immonde à mes yeux, qu'il m'avait achevée, qu'il avait fini de me tuer. Impossible d'évoquer le sujet; impossible d'être moi face à lui." Parce qu'il y a un moment pour tout, ce n'était peut-être pas l'occasion. D'autant plus que tu ne sembles pas avoir réfléchi à l'option "tout lui dire en face et lui renvoyer sa perversion dans la gueule". Et ce genre de choses ne peut s'improviser lors d'une rencontre faite par hasard, Ether, il faut une préparation. "Je ne l'ai jamais revu depuis, je ne le reverrai pas, je ne l'affronterai pas; la force, le courage me manquent. " Pour l'instant. Mais tout n'est que changement, pourquoi ça ne changerait pas ? et, de toute façon, tu n'as pas d'autres obligations que celles que tu t'imposes. Tu peux te reconstruire en lui faisant face... ou en cherchant l'indifférence. Il n'y a pas de voie unique. Et ce n'est pas une question de courage. C'est une question de cheminement personnel, si je puis dire. Bises, Ether.
commentaire n° :1 posté par : Miss Cruchotte le: 05/01/2008 à 15h32

Ce que tu dis est vrai, Miss Cruchotte. Il m'aurait été bien impossible de lui dire quoi que ce soit de tout ça. De la même façon que je n'estime pas nécessaire d'avoir à l'offronter pour vivre bien.
Je n'éprouve pas le besoin de me replonger dans l'horreur pour avancer.
Tout n'est que changement, en effet. Aucune porte n'est totalement close, si ce n'est celle de mon pardon, je crois.
Bises à toi aussi!!

réponse de : ether-et... le: 05/01/2008 à 17h03
Me voilà là à lire ses lignes et à me replonger moi aussi dans 8/10 ans..... tes mots sont si justes ils me rappellent tant ceux que j'ai dans la bouche et que je ne dis pas. Peu de gens savent, très peu, si peu. Lui c'était mon pére, cet homme qui devant l'horreur de ce qu'il avait fait est parti, il a fui, il c'est enfui. Peu importe les liens du sang sont d'une imbécilité cruelle. Un jour j'ai eu des enfants, et j'ai décidé que cela suffisait, tout à changer à partir de ce moment là, j'ai arrêté de rechercher le pére dans mes relations, j'ai décidé de plus avoir peur et de pardonner. Oui ce soir là je me suis saouler (c'est mon truc à moi çà !) et dnas une montagne de sanglot, je l'ai dit, je l'ai crier, ou que tu sois je te pardonne, et aussi je me pardonne d'avoir été une petite fille de 8/10 ans, de ne pas avoir compris, d'avoir été surprise et d'à peine avoir compris. Oui je lui ai pardonné sa bêtise, je lui ai pardonné d'avoir commis l'impardonnable et j'ai eu l'impression de revivre..... J'ai enfin pu accepter mon corps, accepter que ma vie ne serait pas une vie terne et sans relief, accepter d'avoir du plaisir et de donner du plaisir, accepter d'être une femme tout simplement. Je te souhaite le même cheminement, aujourd'hui à cause de ce pardon oui j'espére pouvoir l'affronter et ne pas me contenter de l'annonce de sa mort. Je veux lui montrer qu'elle femme je suis devenu et que toute la crasse qu'il m'a légué lorsque j'avais 8/10 ans, je m'en suis lavée. Je veux le regarder dans les yeux et je veux que se soit lui qui ressente cela car aujourd'hui je ne suis plus une enfant. Tu as besoin de parcourir ce chemin, tu as besoin de faire le deuil de cette histoire. Je te le souhaite, tu sais que je serais toujours là si tu as besoin.
commentaire n° :2 posté par : Miss Katana le: 08/01/2008 à 19h34

Miss Katana, j'ai beaucoup d'admiration pour toi d'avoir pu, d'avoir eu la force de pardonner à ce père qui a fait l'impardonnable.
Peut être le fait d'avoir eu des enfants t'auras permis de prendre une distance, de hierarchiser tes sentiments et tes émotions.
J'avoue que je suis totalement incapable pour l'heure de lui accorder mon pardon.

Et pire que ça; il cristallise en lui la colère et la haine que j'éprouve pour l'homme de la cave; mais dont je ne connais rien.
Mon demi frère représente ainsi les deux agressions à lui tout seul...

J'espère que le chemin que j'emprunte pourra me mener vers le mieux, la sérénité, la confiance en demain.

Merci en tout cas pour tes lignes qui m'ont fait monter les larmes aux yeux.

réponse de : ether-et... le: 09/01/2008 à 13h55
Ma belle guerriére dévouée aux autres !!! Tu soignes les maux de temps de gens que tu en oublis les tiens. Ton cheminement se fera en temps et en heure je le sais je n'ai pas de crainte, tu trouveras le moment. Pardonner ce n'est pas faire preuve de lacheté ou de pitié c'est simplement décider de ne plus avoir de haine, car cette haine ronge et peu finir par nous gâcher la vie. Non je n'ai plus de haine, je n'ai plus de chagrin, j'ai encore une cicatrise mais elle ne fait plus mal elle ne tire plus elle fait partie de moi. Un jour quelqu'un te guérira, j'ai parlé des enfants mais il n'y a pas eu qu'eux, il y a eu l'inclassable comme tu l'appelles qui partage ma vie, qui a recueilli mes souffrances qui les a compris et qui a su surtout se taire face à çà. Je ne suis pas plus forte qu'une autre, les épreuves de la vie m'ont donné l'envie de me battre. Comme je le dis souvent "Ce dont on ne se souvient pas permet d'oublier" je remplacerais ici le "pas" par le "plus". Quoiqu'il arrive la vie continue et elle vaut la peine d'être vécue. To coeur et ton âme sont pures et çà rien ni personne ne pourra le changer. La merde il faut s'en débarasser et ne pas la camoufler. Je t'embrasse et tu sais que je t'aime très fort !
commentaire n° :3 posté par : Miss Katana le: 09/01/2008 à 19h12

Miss Katana, j'ai mis longtemps à comprendre qui tu étais...je sais, maintenant, grâce à tes citations, ton inclassable et grâce aussi à une miss pas si cruche que ça.
Je sais que tu as raison, que je dois rendre ce dont je ne veux pas.
Je trouverai la clé, je le sais aussi.

Et  m'occuper des autres, c'est précisément pour ne pas m'occuper de moi. Tu connais le problème, n'est ce pas ma belle?

Je t'embrasse très très fort.

réponse de : ether-et... le: 13/01/2008 à 17h43
je n'ai pas vécu ceci mais une chose est sure c'est qu'il faut être forte pour supporter un tel poids durant toutes ces années passées tu as un caractère fort, heuruesement même si au fond de toi cette petite fille que tu as été était fragile, ces évènements ont du te faire grandir plus vite que prévu et ont du aussi bousiller ton enfance qui aurait du être belle et douce tu n'as pu te confronter à lui lors de cette entrevue, pourquoi se blamer de cette décision, tu le feras sûrement un jour, et quand ce jour viendra tu ne te poseras pas de questions et lui jetteras au visage ta haine que tu éprouves depuis tant d'années te demandera t il pardon? osera t il le faire? et toi pourras tu pardonner? à toi de voir mais je pense que si un jour tu arrives à lui dire le fond de ta pensée tu seras enfin délivrer du mal qui te fait souffrir même si tu penses que c'est du passé une mise au point ne pourra qu'être bénéfique pour toi et la paix de ton âme je te souhaite du courage pour surmonter tout ceci et si tu as besoin d'une épaule saches que la mienne est là (non pas pour pleurer seulement pour parler et si pleurs il y a une amie à l'écoute tu trouveras) kiss
commentaire n° :4 posté par : tiffanygirl le: 05/02/2008 à 10h53

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